La scène politique camerounaise vient de connaître un tournant décisif. Après plusieurs mois de spéculations, de tensions internes et de luttes feutrées au sein du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), le président Paul Biya, 92 ans, a officiellement annoncé sa candidature à l’élection présidentielle du 12 octobre 2025. Cette déclaration met un terme aux rumeurs de succession et recentre les lignes de fracture récemment apparues au sein du parti au pouvoir.
A la UneCamerounPolitique

Paul Biya se déclare candidat, le RDPC enterre les spéculations et ouvre la voie à une offensive judiciaire

0

La scène politique camerounaise vient de connaître un tournant décisif. Après plusieurs mois de spéculations, de tensions internes et de luttes feutrées au sein du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), le président Paul Biya, 92 ans, a officiellement annoncé sa candidature à l’élection présidentielle du 12 octobre 2025. Cette déclaration met un terme aux rumeurs de succession et recentre les lignes de fracture récemment apparues au sein du parti au pouvoir.

Dans la foulée, le secrétaire à la communication du comité central du RDPC, Jacques Fame Ndongo, a pris la parole pour réaffirmer la position du parti. Dans un communiqué diffusé ce 14 juillet, il annonce avoir accordé une interview exclusive à la chaîne France 24 pour commenter « la déclaration de candidature de Son Excellence Paul Biya », président national du RDPC. L’intervention, prévue dans Le Journal de l’Afrique, vise à afficher l’unité du parti et à rassurer l’opinion, tant nationale qu’internationale.

Une guerre de communiqués au sommet de l’État

Cette sortie médiatique intervient dans un climat politique particulièrement tendu. Ces dernières semaines, l’opinion publique camerounaise et les observateurs internationaux ont été témoins d’une confrontation ouverte entre deux figures centrales du régime : René Emmanuel Sadi, ministre de la communication, et Jacques Fame Ndongo, conseiller influent du chef de l’État. Par communiqués interposés, les deux hommes ont cristallisé des lignes de fracture sur la question sensible de la succession présidentielle.

Dans le même temps, plusieurs ministres originaires du septentrion ont quitté le gouvernement, parmi lesquels deux anciens barons, Issa Tchiroma Bakary et Bello Bouba Maïgari. Tous deux se sont déclarés candidats à l’élection présidentielle. Leur départ a été interprété comme un désaveu direct à l’endroit du maintien au pouvoir de Paul Biya, ravivant ainsi des tensions régionales et confessionnelles longtemps contenues.

La justice se met en branle contre les dissidents

Depuis quelques jours, la justice semble elle aussi entrer dans la danse. Deux hauts responsables administratifs, ayant servi dans les ministères respectifs des deux anciens ministres démissionnaires, ont été convoqués par les services de recherche de la gendarmerie nationale. Officiellement, il s’agit d’enquêtes préliminaires. Mais les intitulés des convocations, fondés sur les fonctions des personnes concernées, orientent clairement les investigations vers de possibles faits de mauvaise gestion ou de détournement de fonds publics.

À Yaoundé, peu doutent de la nature politique de cette manœuvre. Nombre d’analystes y voient une opération de représailles visant à affaiblir, voire disqualifier, deux figures désormais perçues comme des dissidents. Une saisine du Tribunal criminel spécial (TCS) est même évoquée en coulisses comme une étape prochaine et presque inévitable. À l’approche du scrutin, la justice semble ainsi devenir un levier privilégié pour verrouiller le jeu électoral.

Un climat de verrouillage généralisé

L’échéance électorale est désormais fixée. Le corps électoral a été convoqué pour le 12 octobre 2025, marquant le début officiel du compte à rebours. Or, dès les premières heures, la mécanique institutionnelle semble se refermer sur toute voix dissidente. Si Paul Biya parvient à maintenir la discipline dans les rangs du RDPC et à neutraliser les anciens alliés devenus concurrents, l’élection pourrait s’apparenter à un plébiscite sans véritable compétition.

L’opposition, malgré ses divisions chroniques, pourrait cependant tirer parti de ce climat de crispation pour mobiliser les mécontentements. Plusieurs figures de la société civile appellent déjà à la vigilance, tandis que la communauté internationale observe avec circonspection les signaux contradictoires envoyés depuis Yaoundé : appels au dialogue d’un côté, pressions judiciaires de l’autre.

Des analystes politiques notent que la situation actuelle n’est pas sans rappeler d’autres épisodes marquants du régime Biya, où chaque remise en cause du statu quo s’est accompagnée de mesures de contrôle ou de répression. À la veille d’une élection qui pourrait redessiner les équilibres du pays, les regards se tournent vers les urnes, mais aussi vers les tribunaux.

L’avenir politique du Cameroun semble désormais suspendu à plusieurs scènes parallèles : celle des discours, celle des alliances, celle du droit. Et peut-être bientôt, celle de la rue.

Simon Keng

Reconnaissance : l’Institut universitaire St. Mary’s primé par les patrons des journaux anglophones du Cameroun

Previous article

You may also like

Comments

Leave a reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *